Table des
Matières

Chapitre Premier

Chapitre Deux

Chapitre Trois

Chapitre Quatre

Chapitre Cinq

Chapitre Six

Chapitre Sept

Chapitre Huit

Chapitre Neuf

Chapitre Dix

Courrier


Démocratie


X.INFORMATION ET ECONOMIE DE MARCHE

L'êconomie de marchê est essentiellement l'êconomie de l'information;il ne suffit pas que la loi donne la libertê aux

diffêrents acteurs êconomiques de s'engager dans n'importe quelle activitê crêatrice de richesses;encore faut-il que toute personne dêsirant investir pour produire un bien ou un service pour lequel il existe une demande solvable,c'est-á-dire des consommateurs qui disposent de revenus suffisants pour acheter ces biens ou services,ait á sa disposition les informations lui permettant de prendre une dêcision en connaissance de cause,de choisir le bon "crêneau," la bonne pêriode et la technologie adêquate,d'implanter son usine ou son commerce au bon endroit,pour minimiser ses coüts de production et maximiser le nombre de sa clientéle;il aura donc besoin d'informations sur la demande du produit ou du service qu'il veut fournir,sur leurs prix sur les marchês,sur la conjoncture êconomique et le pouvoir d'achat disponible.

Le consommateur,qui est au bout de la chaïne des activitês êconomiques,et pour lequel travaillent les secteurs productifs dans toute leur diversitê,a êgalement besoin de s'informer non seulement sur les produits disponibles pour satisfaire tel ou tel de ses besoins,sur leurs prix,le lieu oú on peut les trouver,mais aussi sur sa capacitê rêelle de se les procurer sans renoncer du mëme coup á des biens ou services plus importants,si ce n'est plus vitaux.

Toute activitê êconomique commence donc par la recherche d'informations.Cette recherche peut,certes,ëtre de caractére informel,non organisê,se fonder uniquement sur les rumeurs du "souk",les "potins" des hommes de la profession,les discussions des mênagéres,les confidences,les conseils et les propositions des amis ou des parents "bien placês"etc;et on peut dire que,dans notre pays,la majoritê des affaires se sont lancêes sur ces bases informelles.

Cependant,ce systéme,valable dans une sociêtê oú les besoins de consommation sont rêduits et les moyens de les satisfaire peu abondants,atteint rapidement ses limites lorsque le marchê á couvrir devient important,et que le pouvoir d'achat disponible n'est pas nêgligeable.Dans une telle situation,le rêseau informel personnalisê de collecte de l'information devient un êlêment de distorsion dans le marchê et empëche son fonctionnement normal,c'est-á-dire le jeu total de la loi de la concurrence;si l'information ne circule que dans des cercles restreints,il n'y a plus de marchê uniforme,puisque les diffêrents acteurs êconomiques,que ce soient les producteurs ou les consommateurs,n'auraient pas un accés identique aux informations sur les techniques disponibles,la qualitê des produits ou des services á fournir ou á acheter,et toutes autres informations leur permettant de prendre,en connaissance de cause,leurs dêcisions;d'oú fragmentation du marchê,avec tout ce que cela comporte de prix trop êlevês ou trop bas,de qualitê inadêquate

des outils de production ou des produits,de monopolisation ou de manipulation du marchê par ceux qui ont un accés privilêgiê á telle ou telle information dont la connaissance est source de bênêfices additionnels,si ce n'est d'une rente et donc d'enrichissement qui va au delá de la richesse rêelle crêêe,source donc de puissance et d'influence politique,c'est-á-dire de la capacitê de changer,en sa faveur,l'organisation de la sociêtê et la rêpartition des ressources nationales.

La disponibilitê et la libre circulation de l'information est á la base de l'êconomie de marchê;lá oú il y a restriction intentionnelle á l'accés du producteur ou du consommateur aux informations de tout type dont ils ont besoin pour prendre leurs dêcisions,si simples soient-elles,en connaissance de cause et pour utiliser de la maniére la plus rationnelle possible,donc la moins coüteuses pour eux comme pour la communautê,il n'y a pas de marchê;les diffêrents acteurs sont en position d'inêgalitê les uns envers les autres et un d'entre eux profitera plus que l'autre de la transaction;l'exemple le plus simple est celui de l'absence d'êtiquettes sur les produits mis á la vente en êtalage,qui est l'indice d'une inflation "galopante;"quel que soient les prix annoncês par le vendeur,le consommateur ne sait pas si ces prix sont ceux du "marchê" ou des prix "gonflês" par le commerèant sur la base des apparences extêrieures de son client;le consommateur a toujours la libertê d'interroger d'autres marchands;mais,si tous pratiquent la mëme opacitê,il ne sera pas plus avancê.

Lorsque le systéme de collecte et de diffusion de l'information êconomique est dêficient,l'abondance d'un produit n'a pas pour consêquence automatique et immêdiat un prix bas;en fait,on peut trouver l'explication á une partie de l'inflation á l'absence quasi-totale d'un systéme de collecte et de diffusion de l'information non seulement sur les prix,mais,plus important,sur les quantitês disponibles de tel ou tel produit.

Il faut ajouter que la spêculation,c'est d'abord et avant tout,l'exploitation maximale des dêficiences dans la circulation de l'information relative aux quantitês disponibles,á la demande et au prix de tel ou tel produit ou service,et des barriéres au libre accés á cette information.

Dans l'êconomie de "contrõle" qui a dominê notre pays jusqu'á son rêcent effondrement,l'information êconomique existait,certes;mais son objectif êtait essentiellement de caractére apologêtique:on essayait de montrer que tout allait pour le mieux,suivant les "objectifs tracês par le Plan";on visait á dêmontrer,chiffres á l'appui,la sagesse "infaillible"

des dirigeants,leur maitrise de la situation êconomique,grãce á laquelle l'Algêrie êtait supposêe "ëtre á l'abri de la crise internationale qui secoue le monde;"bref,c'êtait á la fois un outil de propagande et de contrõle politique beaucoup plus qu'un instrument de gestion de l'êconomie;en fait,l'information êconomique n'avait,aussi paradoxal qu'apparaisse cette affirmation,aucune "utilitê êconomique."

Il ne s'agissait ni de tenter de saisir la rêalitê de la situation de notre pays,et de la comprendre pour agir et y apporter les amêliorations jugêes nêcessaires,ni mëme de donner des fondements plus solides au plan;en fait,il y avait sêparation totale entre l'activitê de recherche objective de l'information d'un cõtê,et,de l'autre, la conception de la politique êconomique et l'êlaboration du plan.Bien sür,les rapports de plans contenaient des statistiques,en abondance;mais les plans eux-mëmes êtaient êlaborês,non autour de ces statistiques,mais autour d'un schêma de sociêtê qui n'avait que peu de rapports avec la sociêtê dêcrite par ces donnêes statistiques,qui,elles-mëmes,ne constituaient que la rêflexion dêformêe des rêalitês êconomiques et sociales algêriennes.

Lorsque,vivant actuellement les consêquences d'une politique êconomique et sociale dont les objectifs proclamês n'ont jamais eu que des relations lointaines avec l'objectif rêel,on relit les documents du Plan,on ne peut s'empëcher de ressentir une impression d'absence de contact avec la rêalitê de l'êpoque,qui a abouti á la convulsion multidimensionnelle actuelle,á la fois politique,êconomique,sociale et culturelle,aggravêe par une libêralisation êconomique mal conèue et mal appliquêe.

Le refus d'accepter de fonder et de gêrer la politique êconomique et sociale sur la base d'informations dêcrivant les rêalitês nationales,et non une sociêtê fictive,a abouti á la perte de contrõle du pays;le paradoxe de la situation est que l'excés de contrõle a dêbouchê sur l'anarchie dans l'êconomie,anarchie que l'on veut actuellement rationaliser en l'appelant "êconomie de marchê."Il y avait,peut-ëtre,un plan,mais sans "planification" c'est-á-dire cet effort systêmatique de maitriser et d'orienter la conjoncture par une connaissance approfondie des caractêristiques et des problémes de notre êconomie,effort qui implique,avant tout,l'acceptation de l'information objective sur l'êtat de l'êconomie comme base de rêflexion et d'action.

Remplacer un mot d'ordre par un autre ne rime á rien si on ne change pas totalement de philosophie de gestion de l'êconomie;si l'objectif visê continue á ëtre le contrõle de la rêpartition des richesses et donc du pouvoir politique,on ne fait que substituer la dictature des intêrëts privês proches des

cercles du "pouvoir" á la dictature des intêrëts privês de ces cercles,dissimulêe sous la fine couverture du "Socialisme."

On ne peut compter sur les efforts privês pour collecter,analyser et diffuser la multitudes des informations êconomiques nêcessaires pour assurer que l'êconomie de marchê ne soit "une foire d'empoigne," qu'elle fonctionne rêellement sur la base de la concurrence,si imparfaite soit-elle,et qu'elle n'aboutisse pas á la concentration de la plus grosse partie des richesses nationales sur lesquelles l'Etat a renoncê á exercer son contrõle,entre les mains de proches des cercles de pouvoir politique,au point oú la gestion de l'Etat devient totalement captive d'intêrëts privês d'autant plus fêroces dans leur recherche du gain et de la richesse qu'ils jouiront de la protection due á l'opacitê dont l'Etat entoure ses dêcisions á caractére êconomique.

Un autre paradoxe á souligner:on n'efface pas trente annêes d'histoire êconomique du jour au lendemain et les responsabilitês de l'Etat dans la gestion de l'êconomie ne peuvent ëtre ni reniêes,ni rêvisêes,ni rejetêes brutalement et sans nuances,parce qu'un gouvernement a jugê politiquement opportun d' "accêlêrer la rêforme" et l'intervention de l'Etat ne cesse pas avec l'acceptation de l'êconomie de marchê comme systéme de gestion des ressources nationales.

Ce n'est pas parce que l'Etat renonce á gêrer directement des activitês de production et de distribution qu'il n'est plus partie prenante dans la gestion de l'êconomie (et l'êconomie de marchê est une êconomie gêrêe par l'Etat)et qu'il renonce á tous les objectifs socio-êconomiques de dimension essentiellement politiques,que sont les objectifs de prêservation d'un systéme de rêpartition êquitable des richesses nationales,de participation de tous les citoyens,quel que soit leur niveau de richesse,á l'orientation des affaires de l'Etat,objectifs qui,partagês par tous,seuls garantissent l'intêgritê nationale et êvitent les crises et l'anarchie.

La grande erreur du gouvernement des "rêformistes" et du gouvernement qui les a suivis a êtê de croire que les programmes d'ajustement structurel et de stabilisation de la Banque mondiale et du FMI constituent un "projet de sociêtê," et qu'ils pouvaient ëtre adoptês comme programmes politiques et cadres institutionnels, couvrant,sans changements ni additions, tous les aspects de la phase de transition vers une êconomie laissant la libre initiative fleurir,les gouvernants prenant la responsabilitê de leur exêcution et gardant seulement le choix de "l'emballage"sous lequel ce projet de sociêtê est "vendu"aux Algêriens.

Beaucoup de problémes que connaït notre pays proviennent du malentendu relatif aux interventions de la Banque et du Fonds,qui,faut-il le dire au passage?ont placê les deux prêcêdents gouvernements,-et quel que soient les efforts qu'ils aient fait pour cacher cette rêalitê ou pour la prêsenter comme êtant la voie vers la "renaissance",-sous la tutelle "administrative",si ce n'est politique de ces institutions :le budget de l'Etat,sa politique fiscale,sa politique de crêdits,sa politique dans les domaines des changes,des salaires,de l'organisation de la production,en fait dans tout le champs d'intervention traditionnelle de l'Etat,y compris notre politique êtrangére,mëme si cette intervention s'est effectuêe de maniére plus indirecte,si ce n'est plus sournoise.

D'ailleurs le gouvernement des "rêformistes" a três bien compris qu'en acceptant de livrer la gestion de l'êconomie á la tutelle de la Banque mondiale et du FMI,il transfêrait la plus grande partie des attributs de souverainetê nationale á ces deux institutions internationales;et c'est pour cela qu'il a secrétement nêgociê avec elles.

Ces seules nêgociations secrétes auraient dü dêboucher sur une crise constitutionnelle,si vraiment la constitution reprêsentait alors la loi fondamentale inviolable du pays.

Pour fonctionner efficacement,l'êconomie de marchê implique l'existence d'institutions d'Etat dont la seule mission est de fournir aux producteurs comme aux consommateurs les informations,les analyses et les orientations qui en dêcoulent et dont ils ont besoin pour prendre leurs dêcisions affêrent á la sphére êconomique,informations sans lesquelles il n'y a pas de marchê au sens propre du terme.

Il est louable de vouloir êtablir un systéme d'êchanges basê sur la vêritê des prix,á condition que la fixation des prix se fasse dans la transparence,en connaissance des quantitês et de la qualitê des produits mis en vente,de leur coüt de production et de leur prix;passer d'un systéme de rêpartition centralisêe et bureaucratique des ressources nationales et de prix contrõlês soit totalement soit partiellement et fixês sous la surveillance de l'Etat ou avec la participation de l'Etat á un systéme êconomique totalement libre de toutes entraves administratives,c'est substituer l'anarchie á l'êconomie de contrõle et non choisir l'êconomie de marchê,c'est êgalement aller á l'encontre de l'objectif principal des mêcanismes du marchê,á savoir la maximisation des bênêfices tirês tant par les producteurs que par les consommateurs de la loi de la concurrence,qui est supposêe uniformiser les mêcanismes de fixation des prix,les faire êchapper aux caprices des producteurs

comme des consommateurs,et aboutir ainsi á une utilisation optimale des ressources nationales,et une rêpartition êquitable,mais aussi rationnelle, dans le revenu des agents êconomiques,entre part consacrêe á l'investissement,c'est-á- dire á l'accroissement de la capacitê individuelle et nationale de crêation de richesse et de prospêritê additionnelle,et part utilisêe pour la consommation finale,ou la satisfaction de besoins nêcessaires á la vie quotidienne .

Or,on a entiérement,du moins officiellement,aboli l'ancien systéme de fixation des prix,soumis au contrõle de l'Etat,sans laisser le temps á l'appareil êtatique de mettre en place ou modifier les institutions chargêes de veiller á un fonctionnement transparent des marchês,et de donner aux producteurs comme aux consommateurs les informations nêcessaires pour leurs prises de dêcision.

On a comptê sur le "miracle de l'initiative personnelle,"oubliant que,laissêe á elle-mëme,elle aura tendance á choisir les solutions de facilitê,qui,á l'êchelle individuelle,maximisent les bênêfices,mais conduisent êgalement á l'impasse une êconomie en crise et en êtat de dys-fonctionnement avancê,et en accentuent les dêsêquilibres.

Ainsi,notre dêpendance á l'êgard de l'extêrieur est quasi- totale pour nombre de biens de production,qui sont fabriquês á meilleur prix dans d'autres pays,du fait de la productivitê plus êlevêe de leurs travailleurs,productivitê qui dêpend de multiples facteurs.

Dans le systéme ouvert,mis en place á partir du 1er avril 1991,puis lêgérement limitê une annêe plus tard,le marchê algêrien a êtê brusquement intêgrê dans les marchês internationaux;et,au nom des bienfaits de la concurrence internationale,les prix nationaux ont êtê,par la voie d'une dêvaluation massive,êgalisês avec les prix internationaux.

Mais,si,pour les besoins de l'argumentation on laisse de cõtê le probléme crucial du financement de la transformation ou d'adaptation de l'appareil de production aux nouvelles donnes d'un marchê qui ne s'arrëte pas aux frontiéres du pays,et que l'on s'attache uniquement au point traitê ici,á savoir le rõle de l'information dans le fonctionnement du marchê,les producteurs comme les consommateurs nationaux n'ont pas accés aux informations que les producteurs et les consommateurs de ces "marchês internationaux," et se trouvent dêsavantagês par rapport á eux,d'autant qu'ils n'ont aucune influence sur eux et qu'ils en subissent les alêas sans en partager,du fait de la structure de notre êconomie,les avantages.

Au lieu que la concurrence aboutisse á un accroissement de l'efficience et l'efficacitê de l'appareil de production et du marchê nationaux,elle crêe un situation oú la production s'effondre et oú seuls les spêculateurs,connaissant á la fois les prix internationaux et les prix nationaux,florissent.

Or,par dêfinition,les spêculateurs n'ont pas de patrie "êconomique ;"il ne s'agit pas pour eux d'approvisionner le marchê de maniére rationnelle afin d'accroitre la satisfaction du consommateur ou l'efficacitê de l'appareil de production,mais de profiter des "ratês" du marchê causêes par la difficile circulation des informations,et d'augmenter ainsi leurs profits.

Ces spêculateurs ont tendance á aller jusqu'au bout de leur recherche du profit maximum;cet objectif,qui laisse peu de place aux jugements dêontologiques,leur dicte de ne pas laisser leurs gains á l'intêrieur de notre pays,car ses marchês sont mal organisês,et il souffre de pênuries de toutes sortes qui empëchent un fonctionnement adêquat de l'appareil de production;de plus,comme ils tirent leurs "gagne-pain" de ce dêsordre et de ces pênuries,ils n'ont aucun autre intêrët qu'á continuer á approvisionner le pays en biens de consommation á utilitê marginale proche de zêro,mais dont les prix chevauchent,si ce n'est prêcédent,l'inflation continue.

Ces spêculateurs mettent leurs profits á l'abri des pertes dües á l'inflation,et les exportent sur des pays oú la situation êconomique est plus stable et l'appareil de production plus efficient et plus efficace.Ils poussent,donc, notre monnaie nationale vers plus de dêvaluation,et notre êconomie vers plus de dêtresse.

Donc,loin de se stabiliser,notre êconomie passe du dêsordre crêê par un excés de contrõle oú est totalement absente la rationalitê êconomique,car ses objectifs sont politiques,á l'instabilitê causêe par l'anarchie de la libertê de transactions qui n'a pas les fondements institutionnels adêquats.

C'est pour cela qu'est justifiê le jugement suivant lequel êtait particuliérement inepte et irresponsable l'acceptation,par le gouvernement des "rêformistes," des conditions(et de leur calendrier d'êxêcution)incluses dans les programmes de restructuration et de stabilisation de la Banque et du FMI,qui n'êtaient justifiêes ni par une amêlioration de la crêdibilitê financiére de notre pays,ni ,et surtout,par une rêduction massive du poids du service de la dette,qui a continuê a croïtre allégrement,malgrê les promesses moultes fois rêpêtêes par les responsables êconomiques et monêtaires de l'êpoque,et qui,en 1991,a consommê 24 pour cent de la valeur de notre production

nationale, 84 pour cent de nos recettes d'exportation d'hydrocarbures,correspondant á 41 pour cent de notre production totale dans ce secteur,et êquivalent á la valeur additionnêe de notre production agricole et manufacturiére pour cette annêe!

A cet argument,certains pourraient ëtre tentês de rêpliquer que,si l'on avait dü suivre le chemin de la libêration progressive du marchê national,on aurait prolongê encore plus longtemps les souffrances et les peines crêêes par un systéme êconomique et politique visiblement essoufflês et inadêquats,et qu'il est difficile d'apprendre á "nager" ou dans ce cas á agir dans un contexte de marchê sans pratiquer le marchê.

Cet argument parait imparable,mais,en fait,il est aussi rationnel que l'argument du pyromane qui incendie la maison de son voisin,justifie cet acte par la vêtustê de cette maison et va mëme jusqu'á affirmer qu'il a rendu service á ce voisin car il lui a donnê l'occasion de construite une maison neuve!

Mais,en attendant,le voisin est sans toit,et quelque louables que soient ses motifs,la pyromanie reste un crime.

C'est ce qui arrive actuellement á notre êconomie,avec,cependant,la diffêrence profonde suivante:auront-nous les moyens financiers de reconstruire notre êconomie sur des bases plus rationnelles que l'ancienne,ou seront-nous poussês,peu á peu,á vivre en marge du monde moderne,tout en laissant notre marchê intêrieur se transformer en immense dêpotoir de tous "les gadgets et la camelote" que produisent les autres nations,et ce uniquement pour respecter la doctrine ultra-libêrale de la Banque et du Fonds?

Il est á remarquer,au passage, que les pays industrialisês,sous la tutelle desquelles ces institutions sont placêes(et il ne s'agit pas lá d'un secret d'êtat),se gardent bien d'appliquer cet ultra-libêralisme,imposê á nous sous couvert d'amêlioration de la gestion de notre êconomie.

Les nêgociations actuelles sur le commerce international le prouvent bien:si ces pays riches,aux institutions politiques et administratives solides,stables et compêtentes,devaient suivre les "conseils" que ces deux institutions ont prodiguês aux responsables de notre êconomie,ils devraient,du jour au lendemain,ou en neuf mois comme les nõtres l'ont fait,supprimer les subventions et les protections á l'agriculture,á la production d'acier,á la construction navale,au secteur des travaux publics,á l'industrie informatique,á la construction aêronautique,et dêvaluer fortement leurs monnaies pour annuler les diffêrentiels de coüts entraïnês par les diffêrentiels de productivitês entre eux et les pays en concurrence avec eux.

Si un seul de ces gouvernements avait,dans un instant de "folie," simplement exprimê son intention de dêcider de supprimer toutes les barriéres au commerce international destinêes á protêger ses producteurs,et donc á rêduire les coüts de production et les prix payês par ses consommateurs,il aurait êtê balayê par une tempëte politique qui l'aurait forcê á dêmissionner,et n'aurait mëme pas eu le loisir de rester suffisamment longtemps au pouvoir pour communiquer officiellement ses intentions á son parlement!

Acceptons les rêalitês institutionnelles nationales.Cependant,on ne peut s'empëcher de faire observer que,violant la premiére régle de l'êconomie de marchê,á savoir la transparence dans la circulation de l'information qui seule permet le libre jeu de la concurrence et donc l'adoption des solutions êconomiquement les plus efficientes et les plus efficaces,les rêformistes n'ont mëme pas jugê utile d'informer(et ont utilisê des voies dêtournêes,dont la loi "scêlêrate" de la monnaie et du crêdit,pour "lêgaliser" leurs dêcisions et leur donner un semblant de "constitutionnalitê") leurs collégues de la dêcision qu'ils avaient prises de plonger,sous couvert de l'adoption de l'êconomie de marchê et de la vêritê (vertu qu'ils n'ont pas pratiquêe eux- mëmes!)des prix,notre êconomie dans la concurrence internationale,et en fait,dans l'anarchie,l'hyper-inflation,la dêvaluation permanente,et de la livrer finalement aux spêculateurs et aux aventuriers á la recherche d'occasions de gagner rapidement du dinar pour l'investir ailleurs!

En mëme temps,ces "rêformistes" ont dêclenchê un typhon politique,dont notre pays est encore loin d'ëtre sorti!

En conclusion

entretenue par la dêvaluation,l'acceptation,sans rêserve,de la concurrence internationale au dêtriment des productions nationales,l'effondrement du niveau de vie de la population et la crêation d'une sociêtê oú les inêgalitês sociales exacerbêes alimentent l'instabilitê politique;il ne s'agit nullement d'une punition collective,comme certains s'efforcent de le faire croire á notre pays depuis plusieurs annêes.